Mme Doumbia Mama KOITE, présidente de FEMNET-Mali : «Justice doit être rendue pour que la paix puisse revenir au Mali ».
8 mars, journée internationale de la femme. Le thème cette année est : « le rôle de la femme dans la consolidation de la paix». Pour l’occasion, Le Canard Déchainé s’érige, tout le long du mois de mars, en tribune où à des femmes-leaders plaident leur cause. L’invitée du jour est Mme Doumbia Mama KOITE, présidente de FEMNET-Mali.
Voulez-vous, vous présenter à nos lecteurs?
Je suis Mme Doumbia Mama KOITE, je suis la présidente de FEMNET-Mali.
Qu’est-ce que c’est FEMNET ?
FEMNET est le Réseau de Développement et de Communication des Femmes Africaine, il a 25 ans. FEMNET-Mali est un point focal du réseau des femmes maliennes qui est affilié au réseau régional basé à Nairobi.
Bientôt c’est le 8 mars, peut-on connaitre votre programme de cette année et qu’est-ce qui fait sa particularité?
Nous n’avons pas de programme particulier cette année. Mais dans le cadre des festivités du 8 mars, nous avons prévu une cérémonie dans la commune de Naréna (Kayes). Là, nous avons prévu de remettre des actes de naissance à des filles qui doivent aller à l’école. Ce programme baptisé « droit et citoyenneté des femmes » permettra à des femmes d’avoir, aussi, des cartes d’identité et pour celles qui veulent se marier légalement, des actes de mariage.
Le thème du 8 mars cette année est : « le rôle de la femme dans la consolidation de la paix ». Qu’est-ce que FEMNET-Mali entend faire dans ce sens ?
Nous sommes un réseau qui travaille beaucoup sur les questions de paix et de sécurité. Nous avons fait la promotion de la norme sur la responsabilité de protéger qui est une norme internationale affirmant que l’Etat a la responsabilité première de protéger ses populations. Ce qui s’est passé au Mali en 2012 et en 2013 est très grave. La phase post-conflit, dans laquelle nous sommes, doit être consacrée à la réconciliation des cœurs et des esprits. Les femmes et les enfants qui sont les plus grandes victimes de cette crise doivent obtenir réparation et justice. Autant nous travaillons pour la paix, autant nous nous battrons pour que justice soit faite, autant les femmes doivent être impliquées dans la résolution définitive de cette crise.
Selon vous, le Mali est-il en bonne voie ?
Je crois que la volonté est là, mais je suis sceptique au regard de certains actes qui ont été posés. Je n’ai pas compris qu’on ait accepté de libérer des criminels par des accords politiques. La politique ne doit plus se mêler de la justice si l’on veut éviter une justice à plusieurs vitesses. Justice doit être rendue pour que la paix puisse revenir au Mali.
La législature actuelle n’a donné que 12 femmes-députées contre 15 dans la précédente. Que faut-il faire pour remédier à cette situation ?
C’est une plaie, une mauvaise image que le Mali a donnée avec cette élection. La Tunisie, un pays menacé par le joug islamiste, a pu se libérer et a adopté une constitution consacrant la parité homme-femme. Au Mali, où l’on se dit démocratie, c’est écœurant de voir un tel résultat, avec 50,4% de la population constituée de femmes.
Avec les élections communales, le tir doit être rectifié. Car, plus que l’élection présidentielle et les élections législatives, les communales sont des élections de proximité où les femmes ont un grand rôle à jouer.
Que pensez-vous de la situation globale des femmes au Mali ? Comment la voyez dans 10 ans ?
Nous avons beaucoup travaillé sur l’amélioration des conditions des femmes, mais les pesanteurs socioculturelles handicapent nos efforts. Il faudrait plusieurs campagnes de sensibilisation pour que les hommes puissent comprendre que le Mali se fera avec les femmes, aussi.
La question n’est pas de savoir ce qui va se passer dans 10 ans mais qu’est-ce qu’il faut faire aujourd’hui. Demain, c’est aujourd’hui. Ce n’est pas normal qu’on utilise les femmes pour applaudir, pour danser et taper les tams-tams et qu’on les abandonne une fois au pouvoir.
Votre dernier mot !
Je crois que nous ne devons plus tergiverser, car, nous avons encore du feu entre les mains. La réconciliation doit être inclusive pour que les plaies puissent se cicatriser en profondeur. Je souhaite la paix au Mali. Merci !
Propos recueillis par
Aïssata Diarra Mamadou Togola
SOURCE: Canard Déchainé du 5 mar 2014.
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